mercredi 28 avril 2021

Réseaux sociaux : le grand malentendu

 

Parlons réseaux sociaux avec Francis.


Réseaux sociaux : le grand malentendu 

22 avril 2021

On a eu l’occasion d’en discuter en 2017, Facebook n’est pas le lieu où faire la révolution. Même en sachant cela, il y a encore de nos congénères pour en mettre trop sur le dos des réseaux sociaux, pour en attendre infiniment plus que ce qu’ils offrent sans à l’inverse profiter du meilleur qu’on en pourrait tirer.

Le reproche que l’on fait aux réseaux sociaux, qu’ils servent de chambre d’écho à ses propres convictions, est tout de même étonnant. Un réseau social n’est rien d’autre que ça, une occasion de se réunir entre personnes qui ont en commun des points de vue, des intérêts, des positions politiques, un statut social, etc. C’est exactement le rôle du réseau social ante l’époque cybernétique : club, association, confrérie, ligue, parti, corporation, guilde, congrégation, société…

Toi que la chicane entre des personnes inconnues et disposant de convictions diamétralement opposées déçoit, veux-tu me faire croire que, dans la vraie vie, tu invites à dîner des gens qui te conspuent de manière véhémente ?

T’imaginais-tu qu’en trois lignes, rédigées en toute vitesse après le petit-déjeuner, tu réussirais à convaincre un terreplatiste d’une chose que des siècles de science n’ont pas réussi à lui faire comprendre ?

Tu en connais beaucoup, toi, des loustics qui se disent : « Tiens, il y a une nouvelle association qui vient d’être créée, personne ne sait quel est son but, ses membres ont tous des avis contradictoires et on s’y insulte à qui mieux mieux, je vais donc en faire partie. »

Moi, non plus. C’est pourquoi quand on joint un groupe, on le fait non dans le but de persuader des gens qui ont des convictions opposées, mais dans celui de faire évoluer la réflexion de personnes dont on partage les bases. Et, dans le cas de Facebook, c’est plus généralement juste pour prendre des nouvelles de personnes avec qui on a envie d’être en contact.

Quand je reçois une demande de correspondance, car j’ai des correspondant·e·s (les ami·e·s sont des gens qu’on peut déranger en plein milieu de la nuit en cas de problème et, comme disait mon père, ça se compte sur les doigts d’une main), je réplique en mettant au clair mes positions sociales, économiques, politiques, religieuses et scientifiques. Ç’a le mérite d’éviter les pertes de temps de part et d’autre.

Comme nombre d’entre elles et eux, j’utilise les réseaux sociaux pour m’informer de ce que font mes autres camarades. Si les infos me parviennent, le contenu n’est pas créé par les réseaux sociaux, mais par des sources dont je m’assure de la fiabilité selon les mêmes règles que pour les livres, les articles scientifiques et les sites webs :

—rationalité des méthodes;
—reproductibilité des expériences;
—solidité des références;
—cohérence logique des raisonnements;
—falsifiabilité des théories;
—évaluation par les pairs dotés d’une même expertise ou d’une expertise équivalente, etc.

Avec toutefois l’avantage formidable de disposer d’un vaste réseau de personnes ayant des intérêts proches, ce qui donne accès à une multitude de sources sans avoir à tout éplucher soi-même puisque le travail collectif permet d’embrasser plus large.

Dans le même ordre d’idées, j’ai toujours refusé de permettre les commentaires à la suite des billets sur mon site web. Les grands médias qui s’étaient d’abord engouffrés dans cette mode cool ont fini par se rendre compte que les commentaires n’étaient qu’un déversoir de bile pour les personnes frustrées. Que vous disent toutes les grosses gommes de la communication ? « Ne lisez jamais les commentaires en dessous des articles ! » Les personnes qui ont vraiment des arguments intéressants, utiles et convaincants prennent la peine de nous écrire pour nous les transmettre et on peut s’en servir pour la suite de nos réflexions et de nos recherches. Il m’est même arrivé de publier une réplique très critique à l’égard de l’un de mes billets.

Mais si vous voulez faire œuvre de conviction, contribuer à des changements politiques, la diffusion dans les réseaux sociaux n’est pas nécessairement le meilleur moyen. Il faut travailler sur le terrain, toutes les personnes disposant d’une expérience syndicale vous le diront. Confondre l’outil avec le contenu, c’est ce que nous ne cessons de faire à chaque innovation technologique, que ce soit l’imprimé, le téléphone, le courriel ou les réseaux sociaux sur le web.

P.S. : J’aurai l’occasion de revenir un jour sur notre naïveté à l’égard de la « magie » technologique, comme si les tuyaux nous épargnaient de choisir ce qu’ils transportent. Tous les petits vieux et les petites vieilles de mon âge se rappellent la révolution de l’audio-visuel dans les années 60, qui a débouché en fait sur les ennuyeuses séances de projections de diapositives pendant les cours de catéchèse.

Francis Lagacé

«»-----------------------«»

SITE DE FRANCIS LAGACÉ

Aucun commentaire: