Laissons la parole à Francis
20 février 2021
Il existe des expressions qui deviennent très populaires et dont on ne sait très bien comment elles sont nées. On ne peut souvent que supposer les détours de la réflexion qui a présidé à leur conception.
Dans d’autres circonstances, il est possible de retracer leur parcours parce qu’on a des indices assez précis sur leur origine. Tel est par exemple le cas de la joyeuse formule Il est toujours 5 heures quelque part, qu’on utilise comme prétexte pour devancer l’apéro ou pour justifier qu’on le prenne à n’importe quelle heure.
Le succès de cette locution a été phénoménal depuis les débuts de la pandémie, chacun·e ayant eu l’occasion de remarquer que le confinement a suscité un accroissement considérable de la consommation d’alcool, et la SAQ (Société des alcools du Québec) ne s’en plaint pas.
La tournure est même devenue le titre d’une émission diffusée sur la première chaîne de la radio publique canadienne.
Remontons donc la petite histoire afin d’accompagner à rebours cette fameuse phrase. L’expression s’est épanouie dans le monde dit « artistique », mais disons plutôt qu’il s’agit de celui des vedettes médiatiques. Et c’est de là qu’elle s’est répandue dans la population, mais avant de se disséminer chez les têtes d’affiche, elle avait fleuri dans un univers qui en est très proche, soit celui de la publicité et des communications. C’est donc d’abord chez les publicitaires et autres métiers associés qu’on entendait surtout cette incitation à lever le premier verre.
Mais de quelle maison de publicité, de la cuisse de quelle jupitérienne société est issue la formulation originale ? Il appert que la firme Publicis, laquelle collaborait avec BCP, en était utilisatrice dans les années 2010 et que c’est de BCP (qui s’est unie à Publicis en 2014) qu’elle tenait le mot.
Mais où la graine en avait-elle été semée ? Si on tire le fil, on voit apparaître l’énonciation première du célèbre cliché au début des années 1990 par une employée en placement média chez BCP. Cette employée s’appelait Suzanne Gravel. C’est elle qui répétait à qui voulait l’entendre que, si on attend cinq heures pour commencer l’apéro, on peut compter sur le fait qu’il est bien cinq heures quelque part autour du globe.
Lasse de devoir se justifier de prendre l’apéro quand bon lui semble, elle avait fait part de son agacement à son beau-frère. Ce dernier lui avait alors dit : « Sachant qu’il y a en tout temps un fuseau horaire où il est cinq heures sur la planète, il te suffira de répondre qu’il est toujours cinq heures quelque part. » La solution fut adoptée, qui fit son petit bonhomme de chemin jusque sur les ondes publiques.
Francis Lagacé
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