Drainville et le nouveau Parti Québécois Oublier pour mieux régner
mercredi 2 juillet 2014, par André Frappier
En opposition à la devise du Québec « Je me souviens », Bernard Drainvile nous invite à un exercice d’effacement de mémoire. C’est simple et ça évite de se poser des questions. Lui qui hier n’acceptait aucun compromis et se faisait le chevalier de l’exclusion de tous ceux et celles qui n’adhéraient pas à ce qui était censé être les « valeurs » québécoises, devient soudainement le berger rassembleur.
Le 7 avril dernier, le PQ obtenait 25,4% des votes, soit le pourcentage le plus bas depuis sa première élection en 1970 où il avait obtenu 23,06% et cette baisse a continué de s’accentuer. Il obtenait 19% de l’appui populaire selon le sondage Léger en mai, tendance confirmée par celui de CROP-Le Soleil-La Presse du 19 juin. Cela a conduit les dirigeants du PQ à opérer une opération de maquillage et de fuite en avant comme l’a fait le ministre Drainville avec son appel à bâtir le nouveau Parti québécois. Aucune introspection, du moins publiquement.
Aucune remise en question de la stratégie référendaire devenue avec le temps et particulièrement sous la gouverne de Marois la stratégie de gouvernance souverainiste. Rien sur la charte des valeurs, aucune excuse offerte aux communautés et aux individus qui ont été ostracisées par une campagne de désinformation et de peur réalisée dans le seul but de gagner des votes.
Sans même apporter la moindre réflexion sur les causes d’une telle débâcle, il invite Québec solidaire et Option Nationale à se saborder pour rejoindre le PQ. Drainville lance maintenant un appel à tous afin d’augmenter ces appuis (à l’indépendance) Le PQ serait maintenant devenu un lieu de débats et d’échanges ouvert à toutes les tendances (1). « Une des meilleures façons de les convaincre de la pertinence de l’indépendance, c’est de leur montrer qu’avec un statut de pays, on serait capable de jouer un rôle sur plusieurs grandes questions qui les touchent tout particulièrement : la lutte contre les changements climatiques, la lutte pour une plus grande justice sociale ou la lutte contre les inégalités et la lutte pour la démocratie. »(2)
C’est précisément le contraire que le PQ a fait. En ce qui concerne le transport du pétrole de l’ouest il n’a même pas demandé d’audiences du BAPE , il était en faveur de l’exploitation du pétrole de schiste dans l’île d’Anticosti ainsi que du projet pétrolier dans le golfe du St-Laurent. Tous des projets hautement dangereux pour l’environnement et qui ont également un impact majeur sur les changements climatiques. Il a refusé de respecter sa propre loi adoptée à l’unanimité à l’assemblée nationale concernant les élections à date fixe, pourtant présentée par Bernard Drainville lui-même, en toute reconnaissance du fait que le gouvernement péquiste était minoritaire. Bel exemple de démocratie.
Les deux budgets présentés par le ministre Marceau se sont situés dans la continuité de l’offensive anti sociale dont les travailleurs et travailleuses, les étudiantEs et les personnes démunies ont fait les frais depuis des années. L’atteinte du déficit zéro tel que proposé par le ministre Marceau n’a jamais tenté de remettre en question la façon de chercher des revenus autre que les coupures dans les services et les emplois du secteur public. Il a poussé l’odieux en diminuant les crédits d’impôt pour étudiantEs, sans même en avoir fait mention lors du sommet sur l’éducation tenu l’année précédente. Pendant que les sociétés financières(3) et les compagnies minières s’enrichissent (4), c’est l’augmentation et l’indexation des frais de garderie qui est devenue un enjeu de société.
Le nouveau régime minier adopté par le PQ a conforté les entreprises et n’a pas ramené la part qui nous appartient dans les coffres du gouvernement. Le régime fiscal est demeuré le même, pas question de taxer les transactions financières ou de remettre en place la taxe sur le capital éliminée par le gouvernement Charest. La réflexion concernant la crise politique du PQ se résumera donc comme c’est l’habitude, à une course à la direction où les protagonistes rivaliseront dans les formules de renouveau. Alexandre Cloutier quant à lui, propose une formule d’accès direct au parti qui vient remplacer le travail collectif des associations par un système où la commission politique recevrait directement les propositions des membres mais se réserverait le droit de conserver celles qu’elle aurait jugées pertinentes. Pour lui les élections dans les associations de circonscriptions et les associations régionales créent des groupes et des affrontements. Ce n’est pas un modèle réaliste pour une formation politique. Dans la vision de monsieur Cloutier, le grand rassemblement du PQ doit prendre ses précautions ; élargir la base mais non sans concentrer le pouvoir au sommet.
Pour résoudre la question des inégalités sociales dans une société basée sur le profit où les compagnies financières et les industries possèdent une influence indue et un contrôle économique au-dessus de la population, il est essentiel de soutenir les revendications et les mouvements qui, comme celui des étudiants en 2012, apportent une vision égalitaire de la société et participent à changer le rapport de force. La lutte pour la justice sociale et la souveraineté du Québec ne se fera pas sans créer un rapport de force et sans mobilisation importante. À ce chapitre le Parti québécois a agi comme fossoyeur des aspirations sociales.
Donner une expression démocratique à la voix de la majorité est aussi une priorité. La réforme du mode de scrutin, abandonnée par le PQ, est devenue essentielle pour permettre aux luttes sociales de déboucher sur une expression politique qui leur correspond. Non on n’a pas le droit d’oublier, il faut rassembler nos forces, prendre la rue et construire un parti politique qui correspond aux aspirations sociales de l’ensemble de la population québécoise. Québec solidaire se veut cette alternative, c’est là qu’il faut mettre les énergies !
(1) Le Devoir, 19 juin 2014
(2) Idem
(3) « Le secteur de la finance est le grand gagnant de la financiarisation. Leurs marges bénéficiaires d’exploitation sont passées de 10 % pendant les années 1980 à plus de 25 % en 2013.BOURQUE, » Gilles L La financiarisation de l’économie nuit-elle aux entreprises ? note de recherche de l’IRÉC, octobre 2013.
(4) Selon Christian Simard, de Nature Québec, les minières génèrent actuellement des profits record, en augmentation de plus de 1000 % depuis 2002 pour les 40 plus grandes sociétés minières selon PricewaterhouseCoopers (2011).Gaïa Presse 24 octobre 2011.
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