André Frappier remet les pendules péquistes à l'heure
STRATÉGIE DE CHARME DE LISÉE, LES CAROTTES SONT SUR LE FEU
mercredi 18 janvier 2017, par André Frappier
Jean-François Lisée n’en est pas à une contradiction près mais il illustre bien que le PQ n’est plus qu’un parti de pouvoir. À travers son discours de charme nous tenterons de discerner quelle est la réalité de ce parti.
En décembre dernier l’ancien ministre des Finances sous le gouvernement Marois, Nicolas Marceau affirmait que s’il était élu, le Parti Québécois allait investir dans les services publics afin de stimuler la croissance économique et réduire les inégalités. Il écrivait dans les pages du Devoir que « le Parti libéral a imposé une austérité toxique qui a étouffé notre économie et s’est traduite par des coupes extrêmement sévères dans les services publics… » Il poursuivait en disant que « Seul le Parti québécois propose le véritable et nécessaire réinvestissement dans nos services publics… »
Comme nous l’avons déjà écrit dans cette chronique, le premier budget qu’il a déposé sous l’inspiration du déficit zéro de Lucien Bouchard a apporté des compressions budgétaires comparables à celles prévues dans le premier budget Leitao et des augmentations de dépenses de programmes plus minces que celles du dernier budget libéral. Son second budget présenté juste avant les élections allait dans le même sens.
Si le responsable d’un poste aussi important qu’ex-ministre des Finances et actuel porte-parole du Parti Québécois en matière de finances peut se permettre de contourner ainsi la réalité en promettant l’inverse de ce qu’a fait son gouvernement, sans même le mentionner et encore moins le justifier, c’est signe qu’au PQ on peut promettre n’importe quoi. Gagner l’élection est le seul et unique véritable objectif, le PQ est un parti de pouvoir et non de changement social.
Communautés culturelles
Le nouveau chef du PQ a utilisé une politique de stigmatisation ethnique à de multiples reprises. Il y a à peine quelques mois lors de la course à la chefferie il affirmait candidement que les Burqas pouvaient servir à cacher des kalachnikovs. Il avait également harangué ses sympathisants lors des élections partielles dans St-Henri-St-Anne en 2015. Il s’inquiétait qu’il y ait « pleins de hijabs partout » et déplorait les « signes religieux autour » des enfants. Il terminait en scandant en avez-vous assez, ça suffit, en insistant sur chaque syllabe. [1]
Se servant de la mauvaise presse concernant Adil Charkaoui et des préjugés anti musulmans il avait faussement attaché son collègue Alexandre Cloutier à un appui de sa part lors de la course à la chefferie afin de le déstabiliser.
Nouvellement élu chef il ajoutait les enseignants et les éducatrices en garderie à la liste des employés de l’État qui devront s’abstenir de porter des signes religieux. Durant la course à la direction du PQ, M. Lisée avait limité cette interdiction aux seuls fonctionnaires en autorité, dont les juges et policiers, tel que recommandé par la commission Bouchard-Taylor en 2008. Il proposait également de limiter les seuils d’immigration, mais affirmait du même souffle que la « meilleure immigration possible », ce sont les travailleurs comme ceux que les employeurs de Québec recrutent à « Paris, Bruxelles et Barcelone » qui correspondent « exactement à la demande d’emploi », qui sont immédiatement embauchés et « immédiatement intégrés », « Ça, c’est l’immigration parfaite. » [2]
Ne manquant pas d’audace Jean-François Lisée invite maintenant les membres de la diversité québécoise, selon les termes du PQ, à rallier son parti pour définir le Québec de demain. Ainsi chantait Félix, la veille des élections il t’appelait son fiston… mais du bout des lèvres quand même.
Sortie de pétrole et Anticosti
Jean-François Lisée s’engage maintenant à pousser la Caisse de dépôt et Investissement Québec à se défaire de leurs actifs dans les énergies fossiles. Il a ainsi repris la position avancée par Manon Massé la semaine précédente. Mais il ne se mouille cependant pas sur une cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).
Le PQ sous la direction de Pauline Marois avait fait des promesses similaires lors de la campagne électorale en 2012. Une fois au pouvoir son gouvernement ne voyait plus d’objection au transport de centaines de milliers de barils de pétrole par jour à travers le Québec en direction du Nouveau-Brunswick.
Le PQ signait en 2014 un contrat contraignant pour l’exploration pétrolière sur l’île d’Anticosti, en vertu duquel Québec n’avait pas le droit de se retirer du projet avant la fin du contrat. Cela faisait partie des projets d’enrichissement du Québec. Deux ententes avaient ainsi été signées avec les entreprises Pétrolia, Corridor Resources, Junex et la pétrolière française Maurel & Prom. Nicolas Marceau, alors ministre des Finances estimait que cela participerait à enrichir le gouvernement du Québec grâce à ses prises de participation, aux impôts et aux redevances. Le conseil du Patronat s’était évidemment réjoui de cette nouvelle. Il y a un an à peine le PQ défendait encore cette entente dont les clauses sont demeurées pour l’essentiel confidentielles.et le gouvernement y est toujours lié aujourd’hui.
Protectionnisme et Libre-échange
Lisée propose d’adopter une loi qui forcerait la présence d’une portion majoritaire de contenu québécois lors des appels d’offres, mais il a toujours défendu l’accord de libre-échange avec l’Union européenne qui ouvrira la plupart des appels d’offres aux entreprises européennes. Il affirmait en 2013 alors qu’il était ministre des Relations internationales que ce n’est plus le libre-échange avec la dictature du marché et vantait les mérites de l’éventuel Accord.
L’AECG comporte des mesures pour limiter les pouvoirs des gouvernements démocratiquement élus et les oblige à accorder un traitement spécial aux entreprises étrangères. Une clause garantit en effet aux entreprises étrangères un statut égal ou supérieur à celui des citoyennes et citoyens d’un pays dans les audiences publiques portant sur un projet de réglementation. D’un strict point de vue souverainiste, c’est aussi une restriction directe imposée à la souveraineté d’un État et à sa population.
Jean-François Lisée s’en remet maintenant au gouvernement fédéral pour compenser l’industrie québécoise, particulièrement celle du fromage pour les pertes de bénéfices et de marché.
La souveraineté
Après tout ça il va demander à la population du Québec de l’appuyer pour faire du Québec un pays, un jour, mais pas maintenant. Il ne faut pas trop en parler non plus en période électorale. Depuis fort longtemps le PQ est en panne de stratégie d’accès à la souveraineté, de la gouvernance souverainiste aux conditions gagnantes, 2014 a marqué un point tournant misant tout sur la politique identitaire qui a fracturé le Québec, rendant impossible sous sa gouverne la tenue d’un référendum gagnant avant des années.
Bernard Drainville le savait, Jean-François Lisée le sait aussi et continue de gagner du temps en nous présentant des carottes sous le nez. L’essentiel c’est de gagner les élections et pour y arriver tous les moyens sont bons.
Notes
[1] www.journaldemontreal.com/2015/11/03/hijab-lisee-irresponsable-dit-la-ministre-weil
[2] La Presse, L’Immigration peu utile pour l’économie, 26 septembre 2016.
INFORMATION PRISE ICI
www.pressegauche.org/spip.php?article29345
www.pressegauche.org/spip.php?article29345
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