Laissons Francis Lagacé nous parler de "On" et de "Nous"
Salmigondis de Noël
22 décembre 2014
Comment souhaiter Joyeux Noël quand on n'est pas croyant ? En passant, ici on inclut la personne qui parle comme à chaque fois que c'est utile ou nécessaire.
J'ai entendu l'autre jour une grande vedette dire dans un jeu télévisé : «On exclut toujours la personne qui parle». Cela est évidemment faux. Mais d'où vient donc cette croyance ?
Il y a sans doute deux raisons à cela. D'une part, il y a nos bons maîtres et maîtresses d'autrefois qui voulaient corriger les Québécois de leur usage dans lequel le pronom sujet nous est remplacé par on. Nous, les Québécois, on ne dit pas «nous» comme sujet en langue orale, on dit «on». Répéter la fausse maxime : «On exclut la personne qui parle» était une façon de se rappeler qu'il vaut mieux utiliser nous quand le sens est défini et qu'il inclut la personne qui parle comme dans «Nous sommes allés au cinéma hier.»
L'autre origine de cette confusion est une lecture erronée de certains manuels de grammaire qui donnaient la phrase «On exclut la personne qui parle» comme exemple et non comme règle. C'était un exemple de phrase qu'on peut faire avec on et non une règle d'utilisation. Quand je dis «on m'a téléphoné», on exclut la personne qui parle. Quand je dis, au Québec, on aime la bière, on inclut la personne qui parle.
Le bon usage du bon Maurice Grevisse, dans sa douzième édition refondue par son gendre André Goosse, précise à l'article 725e) que le pronom complément nous et que le possessif notre «s'imposent quand on = nous». Un exemple de cela serait : «On a distribué tous nos fruits, on n'a rien gardé pour nous.»
On est loin de nos moutons incroyants me direz-vous. Moi, qui suis plus athée qu'un iceberg, je fête Noël et j'en souhaite un joyeux aux alentours. C'est un prétexte pour fêter, après tout c'est le solstice. Mais je vous comprends de ne pas aimer l'orgie commerciale des cadeaux obligés, l'incitation à la surconsommation et les airs lourds de mélasse états-unienne mugis par des chanteurs et chanteuses qui rivalisent de vibratos agonisants. C'est profondément déprimant.
Cela me fait penser à cet étudiant qui s'obstinait à vouloir écrire noël avec une minuscule parce qu'il avait vu dans un dictionnaire l'exemple suivant : «un beau noël». Il a fallu que je lui explique la différence entre la fête de Noël et un cantique ou chant de Noël, qu'on appelle «un noël». Par exemple, aux époumoneries funestes dont je parlais plus haut, je préfère les noëls anciens, qui datent des XVe et XVIe siècles. On appelle aussi un noël ou un petit noëlle cadeau qu'on fait à un enfant. Si vous en donnez trente-deux et qu'ils coûtent quatre-vingt-dix-huit dollars chacun, on pourra difficilement parler de «petits noëls».
Pour en revenir à nos boules de Noël, je fêterais tout aussi volontiers Vishnou, Zeus, Aphrodite, Thor, Gaïa et tutti quanti si on avait la sagesse de donner de ces nécessaires congés à l'occasion de leurs fêtes, ces congés que n'aimait pas voltaire parce que ça empêche les employés de travailler.
On comprendra que la période des Fêtes, qui s'appelle ainsi parce qu'il y a trois fêtes : Noël, le jour de l'An et les Rois, est un prétexte, commercial pour notre classe dominante, social pour les autres.
Mais, tout le monde n'a pas ni le cœur ni les moyens de fêter, et pour celleux-là je souhaite qu'on les respecte.
En finissant ce salmigondis, je vous avais prévenuEs, je nous souhaite pour 2015 de remettre la dignité au centre de nos préoccupations sociales, que le printemps ne se fasse pas trop attendre...
LAGACÉ, Francis
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