Parlons souveraineté avec Francis Lagacé
La souveraineté est à gauche
5 décembre 2016
Avec Spinoza, et Frédéric Lordon à sa suite, on définira la souveraineté comme ce pouvoir qui émerge de la collectivité, du groupe humain, lequel se donne une cohérence, nationale souvent mais pas toujours ni uniquement. C'est ce que Spinoza a appelé l'imperium dans un quasi hapax, qui a souvent été traduit par « souveraineté » et que Lordon préfère appeler de son nom latin.
La souveraineté vient nécessairement du peuple et devrait être exercée par le peuple, donc elle est par définition de gauche. Quand elle est capturée, pour reprendre une expression de Lordon, par un individu (monarque ou dictateur), un groupe (oligarchie) ou une structure plus ou moins démocratique (gouvernements, élections indirectes, gouvernance technocratique), il s'agit au mieux d'une délégation, au pire d'une usurpation.
Quand on entend dire, par certains ténors pressés de transférer la domination économique d'une bourgeoisie qu'ils n'aiment pas à une autre qu'ils préfèrent, que la souveraineté n'est ni à gauche ni à droite, mais par en avant, on comprend bien qu'ils se fichent de la souveraineté populaire, ils veulent la capturer pour l'exercer à leurs fins.
Quand on entend certains prétendre qu'il suffit de rapatrier tous les pouvoirs entre les mains des gouvernants et qu'on continuera ensuite les débats entre gauche et droite, on comprend bien que le statu quo social leur convient parfaitement et qu'ils n'ont pas du tout envie que le peuple exerce lui-même sa souveraineté.
Reconnaître que le peuple est souverain, c'est affirmer que la souveraineté est à gauche parce que lui seul devrait l'exercer. Et s'il la délègue parfois, il peut la retirer en tout temps.
LAGACÉ, Francis
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