lundi 22 janvier 2018

« En Israël, le développement d’un fascisme et d’un racisme proche des premières heures du nazisme », dénonce l’historien israélien Zeev Sternhell


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C’est la teneur de l’article qu’il vient de publier dans le quotidien Haaretz, à lire, ci-dessous (traduction CAPJPO-EuroPalestine)

« En Israël, le développement d’un fascisme et d’un racisme proche des premières heures du nazisme », dénonce l’historien israélien Zeev Sternhell 

21 janvier 2018

Spécialiste des fascismes européens du XXème siècle, cet universitaire, lui-même survivant du génocide, a beau continuer de se réclamer d’un certain sionisme, il n’en est pas moins épouvanté par la dégénérescence morale de son pays, au point d’en faire un parallèle avec celui des premières années du régime hitlérien.

« Je me demande souvent comment un historien, dans 50 ans ou dans 100 ans, analysera les temps que nous vivons. Il voudra savoir à quel moment l’opinion israélienne avait commencé à réaliser que l’Etat créé par la Guerre d’Indépendance, sur les ruines des communautés juives d’Europe, et au prix du sang de combattants dont une partie étaient eux-mêmes des survivants du génocide, avait dégénéré en une véritable monstruosité pour ses habitants non juifs.

« Quand certains Israéliens ont-ils compris que leur cruauté et leur capacité à brutaliser l’autre, palestinien ou africain, avait commencé à saper la légitimité morale de leur existence en tant qu’entité souveraine ?

« La réponse, se dira peut-être notre historien, est nichée dans les actions de parlementaires tels que Miki Zohar ou Bezalel Smotrich, et les propositions de lois de la ministre de la Justice Ayelet Shaked. On dirait que la loi sur l’Etat-nation a été rédigée par ce qui se fait de pire chez les ultra-nationalistes européens. Mais dès lors que la gauche ne l’a même pas dénoncée au cours sur le boulevard Rothschild (parcours routinier des manifestations à Tel Aviv, NDLR), on peut considérer que le premier clou a été enfoncé dans le cercueil du vieil Israël, celui dont la Déclaration d’Indépendance est bonne pour le musée. Cette relique archéologique renseignera le visiteur sur ce qu’Israël aurait pu être s’il n’avait pas été désintégré par la déchéance morale apportée par l’occupation et l’apartheid dans les territoires.

« La gauche n’est plus capable de vaincre la toxicité de l’ultra-nationalisme qui a envahi ce pays, celui dont la souche européenne avait quasiment exterminé la majorité du peuple juif. Les interviews que le journaliste de Haaretz Ravit Hecht a réalisées de Smotrich et Zohar (numéros du 3 décembre 2016 et du 28 octobre 2017) devraient être relayées par tous les médias en Israël et dans le monde juif. Dans chacune de ces interviews, on n’y voit pas que la progression d’un fascisme israélien, mais carrément celle d’un racisme voisin du nazisme à ses débuts.

« Comme toute idéologie, la théorie raciale des Nazis s’était développée sur plusieurs années. Dans un premier temps, elle se ‘contentait’ de priver les juifs de leurs droits humains et civils. Il est d’ailleurs possible que sans la Deuxième Guerre Mondiale, la ‘question juive’ se serait soldée par l’expulsion sur une base pseudo ‘volontaire’ des habitants juifs du Reich. Après tout, la majorité des juifs d’Autriche et d’Allemagne ont réussi à partir à temps. C’est peut-être le sort qui attend les Palestiniens.

« De fait, Smotrich et Zohar vous disent qu’ils n’ont pas envie de s’en prendre physiquement aux Palestiniens, pourvu que ces derniers acceptent de ne pas se révolter contre leurs maîtres Juifs. Ils entendent seulement leur interdire l’exercice de leurs droits humains fondamentaux, celui de se gouverner eux-mêmes dans un Etat débarrassé de l’oppression, ou de bénéficier de droits égaux dans le cas où Israël annexerait les territoires. Pour ces deux membres de la majorité parlementaire, les Palestiniens sont voués à rester éternellement sous occupation. Il est probable que le Comité Central du Likoud ait les mêmes vues. Leur raisonnement est des plus simples : les Arabes ne sont pas des Juifs, alors ils ne peuvent revendiquer aucune partie de la terre promise au peuple juif.

« Selon les conceptions de Smotrich, Zohar et Shaked, un juif de New York qui n’a jamais posé le pied dans ce pays est le propriétaire légitime de celui-ci, tandis qu’un Palestinien dont la famille a vécu ici depuis des générations est un étranger, n’habitant ici que grâce à la bienveillance des Juifs.

“Un Palestinien, déclare Zohar à Hecht, ‘n’a aucun droit à l’auto-détermination puisqu’il ne possède pas la terre de ce pays. Parce que je suis une personne décente, je veux bien qu’il réside ici, s’il y est né et qu’il y vit, et je ne lui demanderai pas de partir. Mais je suis au regret de constater qu’ils souffrent d’un grand désavantage : ils ne sont pas nés juifs’.

« On peut en déduire que même si les Palestiniens se convertissaient en masse, qu’ils se laissent pousser des papillotes et qu’ils étudient la Torah, cela ne leur serait d’aucun secours. Telle est la situation des demandeurs d’asile Soudanais et Erythréens et de leurs enfants, qui sont des Israéliens à tous égards. C’était comme çà avec les nazis. Puis vient l’apartheid, qui pourrait dans certaines circonstances être imposé aux Arabes citoyens d’Israël. Mais cela n’a pas l’air de préoccuper la majorité des Israéliens.

(Zeev Sternhell, Haaretz, 19 janvier 2018 : www.haaretz.com/.premium-in-israel-growing-fascism-and-a-racism-akin-to-early-nazism-1.5746488)

CAPJPO-EuroPalestine

 

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