mardi 3 juin 2014

Suivez les pointillés

Francis Lagacé nous parle d'économie


Suivez les pointillés 

2 juin 2014

Je m'apprête à prendre des vacances, le beau temps aidant, et plutôt que de vous laisser sur un coup de gueule contre la petitesse qui accable souvent nos sociétés pourtant capables de tant d'humaine humanité, j'ai voulu suggérer une série de questions que l'on pourrait bien se poser ensemble.

Par exemple, demandons-nous si l'économie existe en dehors de nous. L'économie dirigée a donné certaines catastrophes environnmentales; l'économie non dirigée a donné certaines catastrophes environnementales. Alors pourquoi laisserions-nous tomber l'économie régulée ?

Passons tout de suite à une autre question. Avons-nous besoin de héros ? Du chevalier blanc, nous sommes passés aux chevaliers de l'industrie. Quand j'étais petit, je me cherchais des idoles. On a tendance aussi à avoir des figures tutélaires quand on est adolescent. Mais une société mature pourrait-elle se passer de statues emblématiques ? Le « Ni Dieu ni maître » des anarchistes est bien sympathique. À tout le moins, on pourrait avoir la chance de consentir au pouvoir qu'on accorde et être capable de le retirer quand on estime qu'il n'est plus légitime. N'était-ce pas là la question fondamentale que posait La Boétie dans Le discours de la servitude volontaire ?

De grandes questions qu'on se pose tout le temps depuis toujours. Bon, allons-y donc avec des questions plus spécifiques.

Depuis quelque temps, je me demande, en voyant évoluer les ondes publiques, s'il suffit que la télé et la radio d'État se proclament d'ici pour se dédouaner de leur soumission à l'empire marchand. Un capitaliste d'ici est-il moins exploiteur qu'un capitaliste d'ailleurs ?

Bon, c'est encore une trop grosse question peut-être. J'entendais récemment un spécialiste patenté du journalisme affirmer péremptoirement qu'il y avait déjà trop d'opinions dans les médias. Trop d'opinions ? Quand on est spécialiste du discours public, il me semble qu'il ne suffit pas d'écrire il me semble pour avoir une opinion.

Des sentiments, des commentaires, des impressions, des goûts, des avis, oui il y en a pléthore. Ça ce sont des opinions au sens commun du gros bon sens grâce auquel on pourrait toujours croire que la terre est plate, mais est-ce qu'on pourrait, quand vient le temps d'analyser de manière sérieuse le rôle politique du monde médiatique, car oui le monde médiatique est par définition politique puisqu'il rapporte les affaires de la cité, et s'il ne les rapporte pas, c'est justement un choix délibéré, donc ne pourrait-on pas faire les distinctions qui s'imposent et rappeler que l'opinion au sens spécifique de l'étude des discours est une prise de position basée sur des arguments, lesquels sont des faits soumis à ce qu'on appelle en logique « les tables de la vérité », c'est-à-dire susceptibles d'être qualifiés de vrai ou de faux. Donc, l'opinion journalistique, pas le sentiment au sens commun, c'est quelque chose de rare. Et par ricochet, donc, vous m'entendez venir, que peut-on espérer d'un nouveau média ?

En mettant ces ingrédients dans la mijoteuse, qui sait si la potée sera plus digeste.

De retour pour un nouveau billet quelque part en juillet.

LAGACÉ, Francis




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