lundi 29 juillet 2013

Aléas de mémoire

Francis Lagacé nous parle de mémoire.


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Aléas de mémoire

29 juillet 2013

J'ai lu récemment une biographie de Charles Trenet (ou Trénet, comme il prononçait lui-même) par Jean-Philippe Ségot. L'auteur, dans son avant-propos, dit que l'écriture n'en fut pas facile parce que le sujet de la biographie a souvent fait des déclarations fantaisistes sur son histoire, a embelli certains passages et a mélangé certains épisodes.

Je trouve ce genre de précaution oratoire un peu superflu. En effet, n'est-ce pas vrai de toute personne? La mémoire peut jouer des tours, mais surtout le souvenir affectif est souvent plus important que le souvenir factuel, de sorte que la plupart des gens se souviennent des scènes de leur vie en se donnant un rôle un peu meilleur que celui qu'ils ont effectivement joué.

Souvent on situe telle activité à telle date erronément parce que de façon analogique le souvenir s'accorde bien avec un autre qui a suscité le même sentiment ou parce que les mêmes personnes étaient présentes. Toutes choses qui se précisent facilement en consultant les calendriers et les agendas, en faisant l'appariement avec les faits vérifiables dont tous peuvent attester.

Loin de se dire qu'on ne peut jamais se fier à la mémoire de personne, il faut simplement tenir compte du facteur émotionnel dans la mémoire pour faire les ajustements nécessaires.

D'ailleurs pour les faits importants, les événements traumatiques, quand la mémoire revient, elle est plutôt fiable. Toutes les personnes qui étaient au monde et dotées de conscience raisonnante se souviennent de ce qu'elles faisaient le vendredi 22 novembre 1963, jour de l'assassinat de John F. Kennedy. Tous les Français se souviennent de ce qu'ils faisaient le dimanche 12 juillet 1998 (lorsque les Bleus ont gagné le Mondial de foot). Ça, c'est l'extrême, mais on peut aussi être certain que l'essentiel de ce qui concerne un événement important pour une personne est plutôt bien mémorisé par elle.

À moins bien sûr d'avoir affaire à une personnalité narcissique pathologique, qui niera férocement le moindre souvenir pouvant la désavantager, on saura faire la part des corrections à apporter, mais il y en aura toujours. Ça fait partie de la vie et ça cause de sacrées bonnes discussions dans les repas de famille ou entre amis. Ceux qui tiennent un bon agenda en sortent généralement triomphants.

 Cela ne disqualifie pas la mémoire, cela la rend plus humaine.





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