lundi 10 mars 2014

Qui a des chances d'être élu?

Francis Lagacé pose une excellente question


Qui a des chances d'être élu?

10 mars 2014

Il est un argument souvent utilisé dans les campagnes électorales à propos des candidatEs et des partis à qui l'on dit qu'ils n'ont aucune chance d'être élus.

C'est pourtant, si l'on croit en la démocratie, une idée qui est tout sauf un argument. Les raisons à cet effet sont multiples. Tout d'abord, si ce prétexte avait été pris au sérieux par tous les partis et par tous les candidats, aucun des partis actuels au Québec n'existerait. Nous en serions encore aux deux partis originaux du parlement du Bas-Canada, soit le parti canadien et le parti britannique.

Ensuite, il faut se demander à quoi servent les élections : à élire les personnes qui sont déjà élues ou à voter pour des personnes et des partis dont les programmes correspondent à nos convictions.

Quelle est la volonté de l'électeur, voir élire la personne la plus statistiquement favorisée même si ses politiques suscitent chez lui l'aversion? À cet égard, et c'est bien dommage que la proportionnelle n'existe pas au Québec, attribuer des votes à unE candidatE qui ne sera pas éluE, c'est favoriser la démocratie, car cela permet de compter les appuis de chaque côté, et cela permet au parti de cette personne d'obtenir du financement. En ce sens, on gagne et on fait gagner la démocratie quand on vote selon ses convictions et non pour ce que les devins nous annoncent.

Ensuite, il faut se demander quel est l'intérêt de voter si l'objectif consiste à deviner quelle est la personne que les autres ont choisie pour pouvoir faire comme eux. Ne s'agit-il pas plutôt de se demander quelle est la personne dont les idées nous conviennent? Et la mesure de l'appui à cette personne, même si elle n'est pas élue permet d'en évaluer l'importance dans la population. Si on vote contre ses convictions, on nuit à ses propres idées et on fait avancer les idées adverses, c'est une drôle de conception de la démocratie.

Une façon beaucoup plus positive de regarder les choses consiste à ce dire qu'on profite des élections pour exprimer dans l'urne des idées qu'on va promouvoir par ailleurs le reste du temps.

Une expérience personnelle m'a convaincu très tôt que chaque vote compte. Lorsque j'étudiais à l'Université du Québec à Rimouski, je me suis présenté comme représentant étudiant à la Commission des études. J'ai fait ma campagne à la mesure de mes moyens auprès des différents groupes qui composent la population étudiante.

Le jour des élections arrive, et je me balade dans l'université pour selon l'expression consacrée «faire sortir le vote». Les bureaux fermaient à 17 h. Vers 16 h 55, en descendant un escalier pour me rendre vers ce qui s'appelait le Salon bleu, où se reposaient les étudiantEs entre deux cours ou pour socialiser, je croise un camarade d'un département scientifique et lui demande s'il est allé voter comme il me l'avait promis. Il me répond : «Je n'ai pas vraiment le temps et, de toute façon, ce n'est pas mon vote qui va changer le résultat.» Je lui réplique qu'il a tort et que chaque vote compte.

Le lendemain, je reçois les résultats (à l'époque, les résultats étaient dévoilés par l'administration et il n'y avait pas de représentantE des candidatEs). J'avais été battu par un vote.

Ce qu'il convient d'en retenir, c'est que les chances d'être éluE dépendent toujours du vote que l'on décide d'accorder et qu'on a toujours le choix de voter pour faire avancer ses idées.

LAGACÉ, Francis



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