samedi 3 janvier 2015

Comment la CIA a torturé et menti


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ÉTAT-UNIS

Comment la CIA a torturé et menti 

mardi 16 décembre 2014, par Iris Deroeux

New York, de notre correspondante.-(tiré de Mediapart.fr) Le rapport tant attendu sur les techniques d’interrogatoires et de torture de la CIA a enfin été publié le 9 décembre. C’est une synthèse de 525 pages résumant quatre ans d’enquête sur les pratiques adoptées par la CIA à la suite des attentats du 11 septembre 2001. Si ce rapport n’est qu’un résumé d’un document de plus de 6 700 pages, s’il a été expurgé de noms et de nombreux détails, son contenu n’en est pas moins passionnant, dérangeant et accablant. Il est une nouvelle illustration des errements de la guerre contre le terrorisme.

La commission du Sénat chargée du renseignement en est l’auteur. De 2009 à 2013, elle a enquêté sur les méthodes d’interrogatoire adoptées par la CIA. La commission se fixait comme objectif de déterminer si ce « programme de détention et d’interrogatoire » avait été d’une quelconque utilité pour obtenir des renseignements. Ces méthodes, incluant la simulation de noyade ou la privation de sommeil, ont notamment été utilisées dans des prisons secrètes ou « black sites », ouverts dans plusieurs pays sous l’administration de George W. Bush, entre 2002 et 2006. Les prisonniers y étaient tous soupçonnés d’appartenir à Al-Qaïda. Selon le décompte de la CIA, 119 détenus ont fait les frais de ce programme secret, qui sera interdit en janvier 2009.

 Le résultat du travail de la commission est un document à charge. Il détaille la brutalité des méthodes utilisées, dépassant ce qui avait déjà pu être révélé ailleurs, notamment dans des rapports d’ONG. Il dénonce l’inefficacité de ces méthodes, en racontant précisément quels types d’informations ont pu être obtenus. Il montre que ces interrogatoires renforcés ont rarement permis d’obtenir des résultats, par exemple lors de la traque d’Oussama Ben Laden. Il se penche enfin sur les discours qu’a tenus la CIA pendant cette période afin de justifier le recours à ces méthodes, auprès des médias, du département de la Justice ou encore du Congrès. Le rapport conclut que l’agence a menti au public et aux autorités, jusqu’au président.

De telles conclusions sont loin d’être anodines. Beaucoup était déjà connu des agissements et mensonges de la CIA. Un rapport de Dick Marty, à l’Assemblée parlementaire du conseil de l’Europe, avait révélé les « vols secrets de la CIA » et les lieux d’interrogatoire installés en Europe. Des auditions au Congrès avaient permis de comprendre comment l’administration Bush s’était délibérément engagée dans la voie d’une torture systématisée. Mais ce rapport du Sénat, par la qualité de l’enquête effectuée, donne une nouvelle dimension à l’affaire. Et c’est la raison pour laquelle cela fait plusieurs années que ce document fait l’objet de débats et de disputes. La CIA s’est toujours opposée à sa publication, en revenant sur les efforts de l’administration Obama pour mettre au jour les abus des années Bush).

Elle s’est finalement fendue d’un communiqué, attaché au rapport, dans lequel on lit : « Nous ne pouvons pas nous porter garant pour chaque déclaration individuelle qui a été faite au sujet de ce programme au cours des années, et nous reconnaissons que certaines de ces déclarations étaient fausses. Mais cette étude fait le portrait d’une organisation qui a – à un niveau institutionnel – intentionnellement induit en erreur et rejeté la supervision de la Maison blanche, du Congrès, du département de la justice, et même du bureau de son propre inspecteur général. Cela ne correspond pas à la réalité. »

Du côté républicain, l’accueil est tout aussi glacial. À commencer par les élus républicains de la commission sénatoriale au renseignement. Car si celle-ci est bipartisane – elle compte sept démocrates, sept républicains et un indépendant –, tous les membres républicains à l’exception d’une sénatrice se sont finalement retirés et n’ont pas signé le rapport. De nombreux élus républicains l’ont jugé imprudent, insistant sur les risques de représailles auxquels allaient être exposés les soldats et le personnel américain en poste à l’étranger. Certains rejettent avec véhémence ses conclusions.

Dick Cheney, vice-président sous George W. Bush, s’est exprimé lundi dans le New York Times pour défendre bec et ongles la CIA. Dans les colonnes du Washington Post, c’est l’un des anciens responsables du programme secret de la CIA qui prend la plume (ici). « Ce programme a apporté des renseignements à l’importance critique sur les opérations et la hiérarchie d’Al-Qaïda », assure Jose Rodriguez Jr. Il insiste sur la légalité du programme et sur le fait que les autorités en connaissaient parfaitement l’existence. Il note qu’il n’a pas été consulté, et qu’il n’a pas encore lu le rapport.

Dianne Feinstein, la sénatrice démocrate présidant la commission du renseignement, n’a quant à elle cessé d’insister sur l’importance de cette enquête afin que les États-Unis évitent de répéter leurs erreurs. Lundi, elle déclarait que sa publication était « salutaire pour une société juste qui s’appuie sur le droit ». Barack Obama a lui aussi salué, mardi, la capacité des États-Unis à « affronter ouvertement leur passé ».

Mais de mise en cause ou de poursuites à l’encontre des responsables de ce programme à différents niveaux, il n’est pas question. Au grand dam de journalistes militants tels que Glen Greenwald, qui écrit avec cynisme : « Si les révélations d’aujourd’hui vous rendent malades et vous mettent en colère, écoutez seulement le président : cessez de regarder en arrière et d’être moralisateur, et puis oubliez toutes ces histoires désagréables de torture, comme lui. »

Le feu vert de George Bush

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