lundi 26 octobre 2015

S’informer


Francis Lagacé nous parle des sources d'information


S’informer 

26 octobre 2015

Garder tous ses sens ouverts est nécessaire pour accéder à l’information. Parce que je ne réagis pas de la façon que je vais décrire dans la ligne qui suit, je ne songe pas souvent au fait qu’il y a des gens qui évitent systématiquement l’information, qui changent de chaîne dès qu’il y a des nouvelles, qui tournent la page du livre ou du journal aussitôt qu’il n’est pas question de divertissement et qui sautent à une autre page web ou cliquent sur un autre lien à la simple vue d’un reportage ou d’une analyse.

À l’occasion d’une conversation avec des personnes dont je venais de faire la connaissance, j’ai pleinement pris conscience que l’immense majorité des gens non seulement sélectionnent soigneusement l’information, mais la restreignent au minimum. La discussion avec ce couple à tendance libérale portait sur la situation politique du Canada. À un moment donné, l’homme (car il s’agissait d’un couple d’hétérosexuels) me demande : « Mais où prenez-vous vos informations ? » Cette interrogation me laissa pantois. Surtout, qu’elle fut suivie de l’exclamation : « Moi, c’est la Presse + ! »

Vous me traiterez d’innocent avec raison, mais l’idée qu’on n’ait qu’une seule source d’informations était pour moi une affaire toute nouvelle. Il ne m’était jamais arrivé de penser qu’une personne évoluant dans un milieu très éduqué puisse se restreindre volontairement à ne s’abreuver qu’à un seul robinet et n’en change jamais.

Pour le naïf que j’étais jusqu’alors, il me semblait qu’il fallait chercher toutes les sources et qu’il était très facile d’y avoir accès puisqu’on peut zapper la télé pour aller d’un journal télévisé à l’autre, bien que je comprenne fort naturellement que des personnes peu instruites, malmenées par la vie et fatiguées zappent au contraire pour éviter les dits journaux, mais on parle ici de gens assez à l’aise. Il me semblait qu’il est facile d’avoir accès à tous les journaux du monde sur le web et on n’a même pas besoin d’être abonné pour avoir les manchettes de chacun d’entre eux. Il me semblait qu’il était tout naturel de zapper la radio et de glaner des informations ici et là.

Des journaux papiers, on en trouve partout sur les tables des cafés, restaurants, bancs des métro et autobus... On reçoit des informations en discutant avec nos réseaux et chaque personne ayant ses préférences nous met au courant de ce qu’on apprend dans tel ou tel média. Ensuite on peut confronter les sources, vérifier auprès des organisations bien renseignées, lire l’opinion des groupes qui partagent nos affinités philosophiques, s’abonner à mille feuilles électroniques que l’on reçoit quotidiennement, hebdomadairement, mensuellement. Mais où est-ce que je prends mes informations ? Partout, y compris dans les bibliothèques où il y a encore de ces véhicules d’idées très vintage, qu’on appelle livres.

Au vu de cette richesse, paradoxalement la société hyperinformée où les unités d’information sont sélectionnées et répétées mille fois plutôt que d’offrir mille unités différentes une fois peut favoriser la fermeture des robinets et le confinement à une seule sorte d’interprétation du monde toujours tronquée quand ce n’est pas le refuge dans le glamour qui fait rêver et, surtout, se sentir toujours plus impuissant. D’où la nécessité d’enseignantEs dont je parlais dans le : billet du 12 octobre 2015.

LAGACÉ, Francis





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